Cher Monsieur

Le classique me laissant en ce moment quelques jours de loisir, je voudrais en profiter pour vous adresser mon travail sur les Bembéciens, travail que je finirais par oublier parmi mes paperasses. Vous savez ce qui a fait différer si longtemps mon envoi : la détermination de deux ou trois espèces qui me sont inconnues et pour lesquelles les documents me font défaut. En vous priant de vous charger de cette détermination, je crains bien d'avoir abusé de votre bonté et de votre temps. Vos études, vos recherches, vos préoccupations d'un ordre plus élevé, ne vous laissent pas le loisir que réclament les minuties entomologiques de minimis non curat practor. Veuillez m'excuser, je vous prie, de mon indiscrète demande.

Cependant je tiens beaucoup à vous faire parvenir au plus tôt mon travail, pour vous démontrer que je ne suis pas tout à fait mort à l'entomologie, et continuer désormais les publications auxquelles vous avez donné dans le temps un si bienveillant accueil. En conséquence, je prie Mr. Verlot, chef de l'école botanique de l'école au muséum, de me faire déterminer mes petites bêtes par un entomologiste collectionneur comme il doit y en avoir parmi vos connaissances. Ayez la bonté de lui remettre la boîte que je lui ai fait parvenir, il y a plusieurs mois. Une fois les Hyménoptères étiquetés de leur nom, je m'empresserai de mettre la dernière main à mon mémoire et de vous l'adresser. Si ces espèces sont inconnues, je les décrirai en note.

Agréez, Monsieur, l'expression de mes sentiments les plus affectueux et les plus dévoués.

J.-H. Fabre

Orange,
20 août 1874

source : © Académie des Sciences, Paris.