Mon cher ami,
Vos chenilles n'ont rien de commun avec le Papillon que l'on vit l'an dernier émigrer du Nord au Sud par bandes innombrables. Ce papillon était le Vanessa Cardui, la Belle-Diane des anciens auteurs. La chenille, vivant sur les chardons, n'est pas responsable des méfaits dont vous me parlez. Du reste, les Vanesses sont des papillons diurnes, tandis que vos chenilles appartiennent à un papillon nocturne, du genre Bombyx.
Les documents me manquant sur l'histoire des Lépidptères, j'hésite, pour vos chenilles, entre la Processionnaire du chêne (Bombyx processionea) et la processionnaire du pin (Bombyx pityocampa). J'incline cependant vers cette dernière. La nature des arbres qu'elle ravage aurait décidé la question ; mais vous ne m'en dites rien. Les a-t-on prises sur des chènes ? C'est alors la B. processionea. Sur des pins ? C'est la B. pithyocampa. Je ne puis aller au delà, n'ayant rien sur l'histoire des chenilles au point de vue de la classification.
Vous avez laissé passer le mois de mai sans songer aux Anthrax. Le mal n'est pas grand. C'est en août que la question pourra s'attaquer avec fruit. Dans la première quinzaine d'août a lieu la ponte, l'accouplement devant les talus hantés par les Anthophores. Je compte sur vous pour essayer de me mettre sur la voie de l'étrange énigme qui préoccupe les entomologistes. Les Anthrax, croyez-moi, valent la peine d'être surveillés de près.
Ayez soin de votre fourrage récolté à Sénanque. Il y aura là peut être quelques bons renseignements pour la future flore de Vaucluse.
Votre tout dévoué.
J.-H. Fabre
Sérignan
29 juin 80.
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